La traversée des îles grecques – Crète et Rhodes
Mauvais temps, deux jours d’attente.
Ferry à deux heures du matin au port de Gythio. Adieux à Stavroula. Nuit sur les canapés avec les flots de la mer méditerranéenne pour nous bercer. On descend du navire tandis que le jour s’est levé en Crète. Quelques kilomètres de marche, direction Kissamos. Un café puis l’autostop pour rejoindre Xavia. On y rencontre Mafie et ses chats à quelques pas de la mer. Vin chilien sur la table ; auprès du feu, un chat dans chaque bras jusqu’au bout de la nuit. Temps décalé, comme ce froid inouï. Malade du travail, cette archéologue nous raconte les fragments de ses expériences professionnelles qui ont vidé totalement le sens de sa passion pour l’histoire – cette impressionnante histoire grecque qu’elle semble connaître si bien. En désuétude. Son appartement en location, une saison sur les bateaux touristiques lui permettent de subvenir à ses besoins annuels. Attirés par des endroits naturels, ses conseils nous emmènent sur la côte sud de la Crète. Accessible seulement à pied ou en bateau, notre randonnée solitaire à Loutro longea la mer, effleura les chèvres et traversa quelques villages fantômes. Cap vers l’Est. En quelques voitures, nous voilà à Héraklion puis finalement à Elounda. Omelette et bières, un toit et un trajet vers Irapetra nous sont offerts par une famille rencontrée sous un pont d’autoroute. Là-bas, un vent balbutiant accompagne notre nuit sur la plage, où notre tente lutte avec une tempête avortée. Arrivés à Sitia, nous quittons déjà la ville à plusieurs kilomètres de marche encore, dans l’attente du ferry. Deux jours solitaires sur le sable à contempler un crabe et les vagues. Le retour à Sitia, une nuit dans la salle d’attente du ferry allongés sur nos matelas gonflables. Comme de nombreux voyageurs, on rattrape notre nuit jusqu’à ce que l’île de Rhodes soit à portée de vue. Au loin, les montagnes turques nous observent. Un dernier regard vers la Grèce, des adieux profonds prononcés par le coeur.
Une rencontre ratée
La pluie arrive, on décide de dormir dans la salle d’attente du ferry, à l’abri. À l’aube, deux jeunes cyclistes trempés y prennent place avant qu’une foule les entoure progressivement. Dans l’immense bateau, on les retrouve derrière nous, installés sur des canapés pour y trouver sommeil. On entend parler fort, un cycliste âgé les rejoint avec un grand café pour leur raconter ses mésaventures. On comprend qu’ils sont tous deux allemands au son de leur voix fatiguées ; cette même fatigue qui nous prive l’envie de communiquer. On ressent de la compensation vis-à-vis de leur privation de sommeil. À Rhodes, on y passe la nuit pour repartir le lendemain midi. Au lieu d’embarcation pour alors prendre notre second ferry, on remarque à nouveau les deux allemands avec leur vélo qui attendent le contrôle de leur passeport. Quelques minutes après eux, on entre dans le navire et on s’installe sur la première rangée. La vue est appréciable, les places sont nombreuses pour observer l’avancée ensoleillée du bateau vers la Turquie. Les deux allemands s’installent alors sur la même rangée que nous. Nos regards se croisent encore d’étonnements, nos sourires exprimant le hasard. Au même moment, un voyageur turc âgé s’immisce dans nos retrouvailles pour leur parler de sa carrière photographique de ces dernières décennies.