Passage de la frontière bosniaque à la frontière albanaise

La communication est difficile, son visage dessine une mine inquiète lorsqu’on passe la douane. Un signe qui mime la cigarette pour nous demander si on n’a pas des choses suspectes dans nos sacs. On se perd dans l’alphabet cyrillique en observant les panneaux de signalisation comme l’oscillation des vagues dans la mer. Sur la côte adriatique, on descend à Herceg Novi avant d’être pris en voiture par deux allemands, vivant à Bar. La bonne tournure de nos conversations nous prodigue quelques conseils, par-ci, par-là, pour nos destinations futures et endigue la perception du temps car – déjà – on voit, Budva. Là-bas, on attend un moment notre hôte du soir. Le voilà, un chien aboyant à ses pieds, attaché à ses mains émues car son roquet ne cesse de mordre l’inconnu. Dedans son appartement, une pièce sombre éclairée par des écrans d’ordinateurs. Son contenu, des vidéos géopolitiques créées par ce letton autodidacte, globe-trotteur de casinos, joueur de poker, avant de s’installer au Monténégro pour une vie peu chère. Le lendemain, la forteresse de Kotor, aller-retour en stop, grand soleil et grands nuages. On rencontre Sonya, une Russe, fuyant son pays. Un passage en Turquie avant Budva. Tout sa vie à Saint-Pétersbourg et aujourd’hui des rêves meurtris. Des fleurs effleurent sa mémoire : elle et sa mère dans un grand jardin de couleurs. En quête de sens, perdue sur les plages, à se baigner pour purifier des douleurs muettes. Un sourire en coin pour une rencontre heureuse, la douceur d’une silhouette. Autostop vers Bar, une photographe ukrainienne qui a fui la guerre avec sa famille pour une nouvelle vie. On parle photo, on parle studio au fil de l’eau. À Bar, un Ukrainien qui a été aussi contraint de quitter son pays. Positif, tout sourire, le « secret », convaincu de pouvoir aider les gens sur le plan de leur développement personnel. L’Égypte dans un coin de sa tête. Un plan millimétré sur excel, son temps découpé minutieusement par tâche sur un calendrier pour ne pas en perdre. Kung-Fu Panda au petit déjeuner pour digérer avant de se diriger vers l’Albanie sous la pluie. Shkodër, belle de loin.

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